Pour commencer, comment décrirais-tu ton projet pour ceux qui ne te connaîtraient pas encore ?
Mon projet, c’est de la musique électronique très axée sur le live. L’idée est de créer une musique aussi organique et libre que possible. J’ai un rapport aux machines qui est celui d’une instrumentiste ; je joue toutes les parties en direct. C’est un projet basé sur la boucle, où chaque son est enregistré en temps réel.
Et concrètement, quel matériel utilises-tu sur scène pour cela ?
Actuellement, j’ai une guitare et un micro. Je vais bientôt intégrer un multipad Roland pour les parties rythmiques. À cela s’ajoutent quatre contrôleurs MIDI : trois pour les mains et un pour gérer mes différentes boucles au pied.
Depuis ton passage à Guéret, il s’est passé pas mal de choses. Tu as sorti le single « Crâne Nacré », accompagné d’une vidéo, bien avant ton EP récent. Peux-tu nous en dire plus sur ce morceau et sa vidéo ?
L’EP était déjà prêt l’été dernier, mais il nous a fallu du temps pour peaufiner le mixage et le mastering. Concernant le visualizer de « Crâne Nacré », sa sortie a été précipitée par une bourse de marketing digital des Inouïs du Printemps de Bourges que nous devions utiliser rapidement. J’ai choisi ce titre parce que, même si j’aime tous mes morceaux, c’est celui qui, à mon sens, me pousse le plus dans la direction que j’ai envie d’explorer. Il est sans doute le plus émotionnel de mes compositions.
Parlons de ton dernier EP, « Pied-de-Biche » sorti récemment. Il a été créé il y a un petit moment, mais sa sortie est récente. Raconte-nous un peu sa genèse.
Je l’ai créé l’été dernier à Bastia. Il faisait une chaleur incroyable, et pendant que mes amis étaient à la plage, je suis restée enfermée chez moi tout l’été. Ce n’était pas une période facile pour moi, je sortais de plusieurs situations compliquées. Cet EP a été un moyen de me reconnecter à la musique et à moi-même.
Sur le plan émotionnel, il explore la question de comment rester combatif et solide tout en maintenant cet équilibre délicat entre avancer sans tomber dans un excès d’ego, et sans oublier sa part émotive. C’est vraiment cette tension entre tristesse et force, la nécessité de la résilience, de remonter la pente, et l’espoir d’une lumière au bout du tunnel, toujours avec le cœur.
Cet EP est accompagné d’un visuel magnifique signé Bisou Sauvage. Comment s’est faite cette collaboration ?
J’ai rencontré Bisou Sauvage il y a quelques années. Elle aime beaucoup mes sons, et j’adore son travail. Naturellement, elle m’a proposé de réaliser la pochette. J’ai accepté, enchantée de travailler avec quelqu’un de mon entourage que j’estime. Je lui ai donné quelques mots-clés, mais je tenais surtout à lui laisser une liberté totale pour qu’elle puisse exprimer les choses à sa façon. Elle m’a fait deux propositions, et la seconde, après quelques ajustements, est devenue le visuel final. C’est une gravure, et j’ai même l’exemplaire physique.
Le premier morceau de l’EP est accompagné d’un clip. On y découvre deux personnages en combinaison et ce personnage intriguant, « iTi ». Peux-tu nous parler de la création de ce clip ?
J’ai réfléchi au concept du clip avec mes deux amies qui apparaissent dedans. Un proche chef-opérateur nous a aidé sur l’aspect technique et la réalisation. À l’époque, j’étais obsédée par l’idée de l’introspection face à la course effrénée dictée par les injonctions sociales, une sorte de « course comme fuite ». C’était mon point de départ, bien que difficile à traduire visuellement.
Le choix du morceau à clipper a été discuté. On a écouté tous les titres de l’EP. Mes amies voulaient au départ clipper le deuxième, mais on a finalement opté pour le premier, plus brut. Elles ont estimé qu’il correspondait mieux à notre approche « do it yourself » et qu’il n’y aurait pas de décalage.
Pour le personnage d' »iTi » (celui avec la cagoule), ce sont mes amies qui ont suggéré l’idée de la cagoule et de le peindre. J’ai trouvé ça génial visuellement. Nous y sommes allées un peu au feeling, sans scénario écrit. Au début, l’idée était de montrer la boucle du quotidien dans laquelle on est pris, avec des images qui s’accélèrent, comme une prison infinie. Puis, le clip évolue vers la libération, comment on s’arrête. Le personnage d’ITI incarne cette idée de se poser, de regarder en soi pourquoi on fait les choses, au lieu de simplement courir sans but.
Les deux personnages en blanc, dans ma vision initiale, représentaient une forme de « norme » ou de conformité. Mes amies en ont rigolé, disant que c’était une drôle de conception de la norme : des gens en blanc qui courent ! Mais pour moi, c’était l’idée d’un côté « hygiéniste », normé, qui ne se pose pas de questions.
En plus de cet EP tu me parlais d’autres projets, plus ou moins liés à ITI : un projet poésie, un projet de danse… Peux-tu nous en dire plus ?
Oui, j’ai collaboré avec la poétesse Laura Vazquez dans le cadre du festival Lektos à Bastia, un festival de lecture et de musique. Ils nous ont mis en contact parce que nos univers, sans être similaires, « matchent » bien. C’était une rencontre humaine et artistique formidable. Nous avons créé une sorte de création musicale autour de ses textes. Ce n’est pas exclu que nous refassions quelque chose ensemble.
Ensuite, une compagnie de danse appelée Labotilar, composée de deux danseurs du Ballet National de Marseille, m’a contactée via Instagram. Nous travaillons sur une grosse création musicale autour du flamenco pour 2025-2026. C’est très stimulant ! Nous avons fait une première date à Paris, et nous partons deux semaines en Espagne en septembre pour avancer sur le projet. Ça va être chouette !
Une année pleine de surprises donc ! Et puis, un déménagement. Fini le soleil de Corse ?
Oui, un déménagement à Paris. J’appréhende un peu, mais j’en ressens le besoin pour des raisons personnelles, notamment pour me rapprocher de ma mère. Et puis, je sens que je stagnais un peu en Corse. J’ai beaucoup de gratitude pour ce que cet endroit m’a apporté, professionnellement et amicalement, mais j’ai l’impression qu’il faut que je parte pour que les choses évoluent plus vite.
Des petits projets se profilent là-bas, comme la possibilité de donner des cours de MAO à l’école l’ATLA à Pigalle. J’ai déjà un réseau sur place, donc ce n’est pas vraiment un saut dans le vide. C’est ma ville. Même si j’aime beaucoup l’endroit que je quitte, je suis contente de partir dans cet état d’esprit positif, pas du tout en mode « je n’en peux plus ». C’est une belle façon de partir.